31 Oct
Handi Quoi ?
« On ne devrait pas dire handicapé mais personne à mobilité réduite ». Cette citation qui avait ému un public conquis pose toutefois des interrogations quant au handicap. Peut-on restreindre le handicap à la motricité telle qu’il a été évoqué ici ? Est-il restreint à la déficience plus généralement ? Une personne « déficiente » est-elle forcément handicapée ? Nous pourrions poser bien d’autres questions de ce genre, mais nous allons plutôt vous donner notre avis sur le sujet.
Lors de la Keynote de Géonomie, nous avons pu nous mettre en situation de handicap grâceà différents ateliers animés – entre autres par FTFormation, Invite1Chef, l’Association des Chiens Guides d’Orléans et d’autres. Premier constat que nous avons pu faire : retrouver des objets grâce à leur odeur, goût, forme ou matière, c’est compliqué pour nous qui reconnaissons habituellement les objets avec notre vue. Nous étions bel et bien handicapés à ce moment. Mais pour un malvoyant ou un aveugle… ce n’est pas un handicap de ne pas voir des objets pour les reconnaitre.
Un mal voyant m’a dit un jour, « je ne me sens pas handicapé au quotidien, je suis par contre des fois dans des situations de vulnérabilité ».
Que signifie cette phrase ? Que le handicap est humain et que l’Homme est handicap. Nous pouvons tous être en difficulté dans certaines situations, c’est pour cela que le handicap est dit situationnel. Alors certes, certains sont sujets à plus de situations de vulnérabilité que d’autres, mais nous sommes tous amenés à en rencontrer. Mettez-moi dans un bassin olympique sur une ligne centrale à côté des athlètes paralympiques que nous avons vu cet été et vous verrez ! Ils sont peut-être hémi- para- ou je ne sais quoi -plégiques, croyez-moi, je me sentirais certainement plus vulnérable qu’eux à ce moment.
Mais parlons de vous maintenant. Si, par exemple, vous n’êtes pas à l’aise devant une foule qui attend de boire vos paroles, connaissez-vous Nick Vujicic , l’homme sans bras ni jambes ? Et oui, maintenant que vous l’avez vu sur internet, c’est qui l’handicapé lorsque la situation s’apparente à un véritable one man show ?
Quand on voit Daredevil se battre, on ne croirait pas qu’il est aveugle, et pourtant il l’est. Bon ok, ce n’est qu’un personnage de Comics. Mais attendez, les scénaristes de BD / Comics ont intégré la déficience dans leurs histoires et nous, nous ne les intégrons pas dans notre société ?! Nous venons de montrer que le handicap n’était pas permanent (les handicapés » le sont moins que nous, « valides » à certains moments).
Alors oui, on pourra toujours repousser l’adaptation d’un lieu, histoire de se rappeler que face à un escalier ce sont les personnes en fauteuil qui sont handicapés ; que lors des annonces vocales de la SNCF c’est comme s’il ne s’était rien passé pour les sourds ; que lorsque l’on met des chemins de lumières, les malvoyants sont complètement perdu sur le dénivelé, etc.
Mais dans tout ça, vous allez me dire : « Ok, et la déficience mentale ?!»
Et je vous dis « merci » d’aborder le sujet. Car oui, la multitude de signaux que produiraient toutes ces informations si elles étaient données en même temps et sans prendre en compte le public présent seraient une source de perturbation pour les personnes ayant, par exemple, besoin d’environnement spécifiques (le plus souvent calmes). En d’autres termes, si l’on vous met des signaux lumineux partout, avec une voix qui vous lit les informations, tout en ayant des couleurs et rambardes dans tous les sens, pas sûr que vous ne vous sentiez très bien non plus.
Prenons l’exemple des passages piétons avec des feux. Sur certains passages, on trouve des bandes au sol et un bouton indiquant « rouge piéton » ou un signal sonore indiquant qu’il est possible de traverser. Cette adaptation n’est utile qu’aux malvoyants et aveugles. Mais le fait que le piéton dessiné sur le feu soit rouge, et face à celui qui veut traverser, indique à tout le monde qu’il ne faut pas avancer à ce moment. Cela nécessite une certaine logique apprise dans notre culture, mais vous ne pouvez pas dire que c’est suffisant, ou adapté !
Le but de ce dernier paragraphe était de vous montrer que le handicap est bien situationnel, et que nous le créons de toute pièce avec des environnements inadaptés.
Vous l’aurez compris, nos exemples, références et points de vue sont poussés à l’extrême pour vous faire réagir. Le but étant d’amener tout un chacun à réfléchir sur sa vision du handicap, montrer que malgré les multiples lois pour pousser à l’intégration des personnes en situation de handicap, nous n’en sommes toujours pas à l’inclusion des personnes déficientes.
Et si nous arrêtions de voir la différence comme un handicap !
Dans la culture des sourds, ce qui nous différencie permet parfois de créer un signe unique pour nous reconnaitre, une sorte de prénom en langue des signes. On reconnait une personne parce qu’elle est frisée… on me reconnait parce que je suis grand et maigre, je suis en fauteuil, je suis appareillé, je louche, j’ai de grosses lunettes, une prothèse de jambe, de main et je suis tout sauf « normal(e) ». Pour eux, être normal n’est pas distinctif. C’est l’originalité qui fait la reconnaissance, et en cela il ne faut pas la négliger.
Certains publicitaires semblent l’avoir compris et l’adaptent en des slogans de type : « Venez comme vous êtes », « si vous n’aimez pas vos défauts, quelqu’un les aimera pour vous ». Espérons que ce soit le début d’un changement de vision sur la différence et la fin de la déficience comme handicap.
Car oui, nous sommes uniques, vous êtes qui vous êtes. Soyez en fiers !